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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/143

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isolé, mais à un ordre de choses tout à fait général, dont les exemples sont très-répandus et fourniraient chacun la matière à des observations exactement semblables[1]. On doit donc admettre, comme une chose démontrée, que la violence des torrents n’est pas indéfinie dans sa durée, et qu’elle peut s’arrêter, soit qu’elle ait accompli un effet déterminé, soit qu’elle ait rencontré quelque cause qui l’étouffe.

Les torrents qui présentent ces cas sont vraisemblablement ceux dont la formation est la plus ancienne. — Pour rendre cette conjecture plus probable, je saute de suite à l’extrémité opposée de l’échelle.

On sait déjà que certains villages sont bâtis dans les régions mêmes où débouchent des torrents en pleine action : telles sont les Crottes ; tel est le bourg de Chorges. Il est infiniment probable que leurs fondations ont précédé l’apparition des torrents qui les menacent aujourd’hui. D’une part, ces deux localités sont très-anciennes : Chorges, par exemple, est bien positivement antérieure à l’ère chrétienne. De l’autre, les deux torrents ne peuvent pas avoir agi depuis longtemps avec l’énergie qu’ils ont aujourd’hui. Leur pente se brise brusquement à l’issue de la gorge ; leur lit de déjection n’est pas encore régulièrement formé. Celui de Chorges a exhaussé de 6 mètres dans ces quinze dernières années ; s’il suivait cette même progression depuis 1 000 ans seulement, le bourg serait depuis longtemps enseveli sous une montagne de dépôts. — Celui des Crottes est un gros ravin qui n’est devenu inquiétant que dans ces dernières années.

On peut citer des cas plus concluants encore. — Une église de la vallée

  1. Ici les exemples se pressent. Je citerai :

    — Le ruisseau du Vallon, et plusieurs autres dans la vallée de la Clarée.

    — Le ruisseau d’Insaludey, de Saint-Joseph, et plusieurs autres dans la vallée, de la Guisanne.

    — Le ruisseau de Saint-Jacques, sur la Durance, près Briançon.

    — Le ruisseau de Saint-Sébastien, près Briançon.

    Ce dernier, aujourd’hui encaissé et passant sous un pont, a formé, par la masse de ses alluvions, comme une seconde montagne au pied de la montagne la Roche-Baron. Le village Saint-Martin-Queyrières est bâti sur ce lit, et la route royale no 94 est taillée dans les déjections sur une longueur de plus de 1 200 mètres.

    — Le ruisseau de la Fare : le village de la Roche est bâti sur ses déjections.

    — Le ruisseau de Chanteloube, etc., etc.

    Il y a plusieurs torrents éteints dans le département de l’Isère.