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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/188

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nombre de ses moutons, du jour où l’interdiction des moutons étrangers mettrait en sa jouissance une plus grande étendue de pacages — En reprenant l’exemple du Dévoluy, on trouve que les troupeaux indigènes comptent 12 000 bêtes, et les troupeaux étrangers 24 000. D’après ce qui vient d’être dit, 24 000 bêtes étrangères ne rapportent pas davantage au pays que 4 000 bêtes indigènes. Or, il n’est pas croyable que des habitants aisés qui trouvent des bénéfices à élever 12 000 moutons, n’en puissent pas élever 16 000, lorsqu’ils auront de nouveaux pâturages à mettre en valeur.

Je passe au défrichement. — Là encore les lois sont en défaut, et là encore de bonnes lois seraient nécessaires.

Pour régler les cultures sur les montagnes, il faudrait d’abord faire une distinction essentielle. — Les unes, qui ne détruisent pas la consistance du sol, pourraient être tolérées sans restriction : telles seraient les prairies naturelles ou artificielles. Les autres, qui rendent le sol meuble, ne seraient plus tolérées dans certains quartiers, qu’à la condition d’être assises sur un talus déterminé.

Quel serait ce talus ? — On admet généralement que celui des terres coulantes est de 3 de base sur 2 de hauteur. Or, une pareille inclinaison serait déjà trop forte ; car si les terres coulent jusqu’à cette limite, par la seule action de leur pesanteur et de leur incohésion, elles ne s’y tiendront plus, lorsque les eaux d’une part, et les araires de l’autre, auront augmenté chacune des deux actions. On peut, d’après cette considération, fixer la limite cherchée au talus qui aurait 3 de base pour 1 de hauteur. Bien entendu que c’est là une limite supérieure qui ne pourrait jamais être dépassée[1].

Ce règlement ne s’appliquerait pas seulement aux terrains qui seraient défrichés dans l’avenir. Il atteindrait aussi les défrichements déjà effectués, partout où ces défrichements auraient été suivis d’effets nuisibles bien constatés. Pour réparer les abus du passé, il ne suffirait pas de prévenir les abus futurs ; car le mal qui reste à faire sera toujours peu de chose à côté de celui qui est déjà fait.

Je sais bien que de pareils règlements semblent heurter de front les

  1. Voyez dans la note 17 les mesures proposées par Fabre pour régler les défrichements sur les montagne.