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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/199

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chauves. Là ce n’était pas seulement un sol aride auquel un demandait des sucs, mais un sol mobile qui fuyait sous les essais mêmes. Là, pourtant, l’art a fini par triompher.

Je passe à une dernière objection : pendant le temps que la végétation met à prendre possession du sol, le torrent ne minera-t-il pas constamment les berges ? Celles-ci, s’éboulant sans cesse, ne détruiront-elles pas ainsi la végétation, au fur et à mesure qu’elle se formera ?

Cette objection est toute résolue, lorsqu’on se rappelle que les travaux commencent par le haut. Quand on craint que les eaux n’affouillent une berge avec assez de violence, pour ne pas laisser le temps à la végétation de s’y fixer, on admet qu’elles y arrivent avec la masse et la vitesse qu’on leur voit aujourd’hui. On ne réfléchit pas que les travaux exécutés à l’amont de cette partie auront déjà tellement affaibli le courant, qu’il ne peut plus produire les mêmes effets. S’il les produit, c’est une preuve que les travaux supérieurs ne valent rien, qu’ils sont mal faits, ou qu’ils n’exercent pas encore leurs effets. C’est vers ces travaux alors qu’il faut reporter les soins et les dépenses, qu’on appliquait mal à propos à une partie où ces dépenses et ces soins étaient perdus.

Du reste, au-dessus de toutes les objections planera toujours ce grand fait, qui suffit seul à les détruire toutes : je veux parler des torrents éteints. — Je puis m’abuser ; mais il me paraît de la plus grande évidence que si les forêts ont pu, dans le passé, produire certains effets, elles peuvent encore les produire de nos jours. Pourquoi l’intervention de l’homme les empêcherait-elle ? — Loin de là ; elle doit en hâter l’accomplissement, si elle est ainsi conçue, qu’elle seconde l’effort de la nature au lieu de le contrarier.