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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/274

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La vitesse des eaux serait donc d’un peu plus de 14 mètres par seconde.

Or, une pareille vitesse est excessive. Celles des fleuves les plus rapides ne dépasse par 4 mètres ; encore ces exemples sont-ils cités comme se rapportant à des cas extraordinaires. La vitesse des vents impétueux est de 15 mètres ; ce qui est tout près de celle que nous venons de trouver.

On cite comme un cas de prodigieuse vitesse, l’exemple rapporté par Bouguer, d’un torrent, parti du Cotopaxi, et gonflé par la fusion brusque des neiges qui couvraient des bouches volcaniques. Ce torrent emporta, six heures après l’explosion du volcan, un village situé à trente lieues du cratère, en ligne droite. En admettant la lieue de 5 000 mètres, cela ne ferait qu’une vitesse de 6,94 m par seconde ; et, pour arriver à la vitesse de 14 mètres, il faut supposer que les contours du terrain ont à peu près doublé le parcours Or, c’est là justement ce qu’ajoute Bouguer, et son observation est alors parfaitement d’accord avec les résultats que le calcul nous donne pour les torrents des Hautes-Alpes.

Si l’on calcule la masse de liquide qui s’écoule dans l’intervalle d’une seconde, sous l’influence d’une vitesse de 14,28 m, par la section que nous avons assignée aux torrents, on trouve un cube de 228,48 mc. — Pour se faire une idée de cet énorme débouché, il faut savoir que la Garonne ne débite en temps ordinaire, que 150 mètres cubes d’eau ; que la Seine n’en débite que 130, etc. ainsi, un torrent, de moins de 5 lieues de longueur, lorsqu’il est enflé par les orages, dégorge plus d’eau qu’il n’en passe ordinairement sous les ponts de ces grands fleuves !… Il n’est pas surprenant, dès lors, que la durée des crues soit si courte dans les torrents.

Le calcul peut aussi rendre compte du transport de ces blocs énormes que l’on voit, après les crues, dispersés çà et là sur les lits de déjection. On se rappelle que le torrent les balaye avec une telle facilité qu’ils sont souvent projetés à plusieurs mètres de hauteur, hors de son lit.

Supposons un bloc parfaitement cubique, placé dans le lit d’un torrent, et posé sur une assiette horizontale. Supposons encore que ce bloc soit de l’espèce de pierre la plus lourde. Toutes ces conditions sont défavorables à l’entraînement.

Soient a le côté du cube, que je suppose inconnu, P la pesanteur spécifique de la pierre.

Si le bloc est noyé dans les eaux, il opposera au courant un moment de résistance, représenté par

.

Le moment du choc du fluide sera donné par l’expression

(Navier, Hydraulique, page 106).

laquelle, dans le cas qui nous occupe, devient :

.