Aller au contenu

Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/301

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

NOTE 19.

… Le fait que j’énonce est assez extraordinaire pour que je sente le besoin de le fortifier par une autorité aussi irrécusable…
Chap. XXXIX, page 194.

Voici comment M. Desfontaines s’exprime au sujet des travaux du Rhin (Annales des ponts et chaussées, tome VIII, 1833) :

« … Rarement, du reste, les ouvrages de défense que nous avons à décrire profitent à la navigation. Souvent même ces travaux forment écueil pour la navigation descendante, et gênent la navigation ascendante, soit par les ouvrages saillants qui en résultent, soit en raison de la plus grande vitesse à vaincre lorsque, par suite de la fermeture des bras secondaires, les bateaux sont forcés de prendre le bras principal et toujours rapide du fleuve.

» Il est certain encore que, sous le rapport de la fixation des frontières, ces travaux seraient d’un faible intérêt.

» Il faut donc reconnaître que ces ouvrages ont presque pour but exclusif de protéger les propriétés qui bordent le fleuve. Ces propriétés, abandonnées à elles-mêmes, seraient certainement hors d’état de faire les sacrifices nécessaires à leur conservation, et, par conséquent, l’État doit venir puissamment à leur secours ; mais elles devraient d’autant plus concourir à ces travaux que les flots, les atterrissements artificiels deviennent la propriété des riverains.

» Très-souvent les communes et les riverains spéculent cependant sur la valeur des bois de fascinages, qu’on est obligé d’exploiter sur leur sol pour les préserver d’une submersion inévitable.

» … Plusieurs propriétaires riverains ont été enfin jusqu’à réclamer des indemnités pour la destruction des terrains qu’on n’avait pas cru devoir défendre aux frais de l’État… »

À ce dernier trait, on aperçoit un esprit bien éloigné de la longanimité des habitants des Hautes-Alpes.

On peut lire aussi dans le mémoire récent de MM. Legrom et Chaperon (Annales des ponts et chaussées, mai et juin 1838) combien les travaux exécutés jusqu’à ce jour, avec des sommes énormes, et avec tous les secours de la science et de l’expérience, ont eu peu de durée.

Enfin, dans un rapport fait à la chambre des députés en 1837, M. Jaubert a proposé de soumettre les riverains du Rhin à la règle commune, en exigeant leur concours pour l’exécution de travaux dont eux seuls profitent : cela semble équitable.

Je suis, pour ma part, loin de désapprouver l’intervention de l’État dans des travaux qui auraient uniquement pour but de favoriser l’agriculture. Je pense, tout au contraire, qu’on ne fait généralement pas assez en France pour l’agriculture. Elle est dédaignée des capitalistes, qui préfèrent les hasards de l’industrie ou de la banque à ses revenus modestes mais assurés. L’État la néglige et l’abandonne à ses propres ressources, à ses efforts morcelés, à son igno-