Aller au contenu

Page:Suzie Kerry Michette au harem 1926.djvu/10

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 8 —

— Mon coco, tu serais un amour d’homme si t’allais à la bibli me chercher Frou-frou et l’Almanach Gaulois ; il n’y a que ça qui m’aidera à avaler quatorze heures de chemin de fer !

— Ben, et moi, alors ? répliquait le beau jeune homme qui remplissait un des rôles de gigolos de la pièce, je ne compte pas ? Je t’assure pourtant que je suis un peu là !

— Tu l’as déjà dit, Bébé ! s’exclama une autre « petite femme », t’en parles de trop pour que ce soit intéressant…

— Madame, à quatre pas d’ici je vous le fais savoir, déclame le jeune homme, en roulant le « r », superbe et digne (il avait préparé le conservatoire).

— L’amour en chemin de fer alors ? railla la petite, merci, il me faut mes aises et ma tranquillité… Et puis les tableaux vivants, tu sais, très peu pour moi !

Des « oh ! » amusés et faussement offusqués fusèrent ici et là.

— Voyons, Gladys, tais-toi… Tiens-toi un peu… Si le chef de gare t’entendait !

— Eh bien ! pendant ce temps-là il oublierait qu’il est cocu, voilà tout !…

D’un autre côté quelqu’un se plaignait :

— Oh ! j’ai mal à l’estomac… ça va mal. Moi, les départs ça me donne la colique…

Cependant l’heure du départ approchait et soudain les comédiens firent silence. Un de leurs camarades, qui cumulait l’emploi d’acteur avec celui de secrétaire, arrivait vers eux pour leur remettre à chacun leur billet. Les places étaient réservées… mais tous se hâtèrent de pénétrer sur le quai pour tâcher d’enlever de haute ruse… un coin… le rêve de tous les voyageurs.

Enfin arrivèrent les « gros » de la troupe, Irma Frodytt en tête et son cher camarade l’acteur Roumain : Cémoa Quévla qu’elle lançait et protégeait, et qui l’accompagnait aux Indes en qualité de jeune premier ; puis l’énorme baryton léger, Junior, comique jovial à la scène mais lugubre à