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Page:Suzie Kerry Michette au harem 1926.djvu/26

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trois coups, le rideau va se lever. Michette libérée pour un moment, se passe vivement un peu de poudre, de rouge, et file dans la salle. Aussi bien, elle n’a pas encore vu Adolphe et son Minet, mais ce n’est cependant pas cela qui l’inquiète… Où est Jack ? Sa place est gardée près de lui et elle a la chaise 128… Ah ! le voici… il n’est pas seul… Les présentations sont vites faites et la conversation s’engage malgré les « chutt ! », mi en anglais, mi en français. Michette est coquette et aguichante, et le petit lieutenant commence à la trouver à son goût… Mais Jack est son ami et il a promis, aussi reste-t-il très réservé, d’une froideur aimable qui excite et étonne Michette. La représentation se termine. Le souper suit… Enfin, dans le brouhaha de la fin, Jack s’esquive sous un prétexte. Alors le lieutenant, changeant d’attitude, se penche vers Michette le visage grave et triste.

— Mademoiselle, mon ami m’a dit que c’était vous qui aviez désiré cette rencontre, et il m’a laissé entendre que, oserai-je le dire ? que vous me portiez un intérêt tendre… Est-ce vrai ?

Michette bat des cils d’émotion.

— Oh ! si c’est vrai ! Je n’ai pensé qu’à vous depuis le moment où je vous ai vu… et j’étais assez triste et découragée en constatant que, malgré tous mes efforts, je ne pouvais parvenir à attirer votre attention…

— Quelle erreur… moi aussi je n’avais que vous dans la tête… mais je jouais la comédie de l’indifférence…

— Pourquoi ? interroge Michette en ouvrant de grands yeux, pourquoi, je ne suis pas dangereuse, je suis libre. Et vous ? vous n’êtes pas libre ?

— Si, je suis libre, mais… mais… c’est moi qui suis dangereux… fait-il en baissant la tête.

— Vous ? !

— Hélas ! oui… ça m’est arrivé il y a dix mois dans un port… une femme… vous comprenez ? Maintenant, je n’ai — plus le droit d’aimer comme en a le droit mon ami Jack ce pur et délicieux garçon — d’aimer un petit être comme