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Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 10, 1904.djvu/261

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LE DÉFAUT ET LES EFFETS DU SYSTÈME


n’est qu’une formalité d’apparat ; l’impulsion et la direction continuent à venir du dehors et d’en haut. Sous la troisième République, comme sous la Restauration et sous le premier Empire, c’est toujours l’État central qui gouverne la société locale ; parmi des tiraillements et des frottements, à travers des conflits passagers, il y est et y demeure l’initiateur, le préparateur, le conducteur, le contrôleur, le comptable et l’exécuteur de toute entreprise, le pouvoir prépondérant au département comme à la commune, et avec les conséquences déplorables que l’on connaît. — Autre conséquence encore plus grave : aujourd’hui son ingérence est un bienfait ; car la prépondérance, s’il y renonçait, passerait à l’autre pouvoir, et celui-ci, depuis qu’il appartient à la majorité numérique, n’est plus qu’une force aveugle et brute ; livrée à elle-même et sans contrepoids, son ascendant serait désastreux : avec les inepties de 1789, on verrait reparaître les violences, l’anarchie, les usurpations et la détresse de 1790, 1791 et 1792[1]. — À tout le moins, la centralisation autoritaire offre cela de bon qu’elle nous préserve encore de l’autonomie démocratique. Dans l’état présent des institutions et des esprits, le premier régime, si mauvais qu’il soit, est notre dernier abri contre la malfaisance pire du second.

  1. La Révolution, tome IV, livre III.