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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/162

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y eut beaucoup d’athlètes, et comme leurs compagnons regardaient, ils firent de grands efforts. »

Un siècle plus tard, au temps d’Aristote, de Ménandre et de Démosthène, quand la culture d’esprit est complète, quand la philosophie et la comédie touchent à leur achèvement et à leur décadence, Alexandre débarquant dans la Troade se met nu avec ses compagnons pour honorer par des courses le tombeau d’Achille. Imaginez Napoléon faisant la même chose à sa première campagne d’Italie. L’action correspondante fut pour lui, je suppose, de boutonner son uniforme et d’assister grave et roide au Te Deum à Milan.

On peut voir la perfection de cette éducation corporelle dans le jeune athlète qui lance le disque, dans la courbure de son corps tout penché d’un côté, dans le calcul de tous ses membres qui se tendent ou se ploient pour rassembler le plus de force possible sur un même point. Un mot de Platon est bien frappant à ce sujet ; il divise l’éducation en deux branches égales, la gymnastique et la musique. Par gymnastique, il entend tout ce qui touche à la formation et à l’exercice du corps nu. Par musique, il entend tout ce qui est compris dans le chant, c’est-à-dire, outre la musique, les paroles et les idées des hymnes et des poëmes qui enseignent la religion, la justice et l’histoire des héros. Quelle percée et quelle ouverture sur la jeunesse antique ! Quel contraste, si l’on met en regard notre éducation de savantasses et de culs-de-jatte !

Une grande statue couchée, le Nil : la copie en est aux Tuileries. Rien de plus gracieux, de plus fluide que les petits enfants si petits qui jouent sur son large corps ; on ne peut mieux exprimer l’ampleur, le calme,