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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/174

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long ordre, aussi diverses d’armes et d’esprit que de langage : Nomades, Africains aux robes pendantes, Léléges, Cares, les Gélons armés de flèches, les Morins, les plus lointains des hommes, les Dahes indomptés. L’Euphrate coule docile, et l’Araxe frémit sous le pont qui l’a vaincu. »

On entre dans le temple, sous la haute coupole qui s’évase en tous sens comme un ciel intérieur ; la lumière tombe magnifiquement, d’une grande chute, par l’unique ouverture de la cime, et, près de cette vive clarté, des ombres froides, des poussières transparentes, rampent lentement le long des courbures. Tout à l’entour les chapelles des anciens dieux, chacune entre ces colonnes, se rangent en cercle en suivant la muraille : l’énormité de la rotonde les rapetisse encore ; ils vivent ainsi réunis et amoindris sous l’hospitalité et la majesté du peuple romain, seule divinité qui subsiste dans l’univers conquis. Telle est l’impression que laisse cette architecture : elle n’est pas simple comme un temple grec, elle ne correspond pas à un sentiment primitif comme la religion grecque ; elle indique une civilisation avancée, un art calculé, une réflexion savante. Elle aspire au grandiose, elle veut exciter l’étonnement et l’admiration ; elle fait partie d’un gouvernement, elle complète un spectacle ; elle est une décoration dans une fête, mais cette fête est celle de l’empire romain.

On longe le Forum, ses trois arcs de triomphe, les grandes voûtes de ses Basiliques ruinées, l’énorme Colisée. Il y en avait trois ou quatre autres ; l’un d’eux, le Circus maximus, contenait quatre cent mille spectateurs. Dans un combat naval sous Claude, dix-neuf mille gladiateurs combattirent ; un triton d’argent sorti du lac avait