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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/252

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Villa Borghèse.


Je n’ai pas grand’chose à te dire sur les autres villas ; elles suggèrent des idées semblables ; la même vie produisait les mêmes goûts. Quelques-unes sont plus grandes, plus campagnardes, dessinées plus librement, entre autres la villa Borghèse. On y va par la place du Peuple ; cette place avec ses églises, ses obélisques et ses fontaines, avec l’escalier monumental du Pincio, est singulière et belle. Je compare toujours mentalement ces monuments à ceux de Paris, auxquels je suis accoutumé : on y trouve moins de grandeur matérielle, moins d’espace, moins de moellons que dans la place de la Concorde et l’Arc de Triomphe ; mais cela est plus inventé et plus intéressant.

Cette villa Borghèse est un vaste parc de quatre milles de tour, semé de bâtiments de tout genre. À l’entrée est un portique égyptien du plus mauvais effet ; c’est quelque importation moderne. L’intérieur est plus harmonieux et tout classique : ici un péristyle, là un petit temple, plus loin une colonnade en ruine, un portique, des balustres, de grands vases ronds, une sorte de cirque. Le terrain onduleux courbe et relève de belles prairies toutes rouges d’anémones molles et tremblantes. Les pins, séparés à dessein, profilent dans l’air blanc leur taille élégante et leur tête sérieuse. Aux détours des allées, les fontaines bruissent, et dans les petites vallées les grands chênes encore nus dressent leurs vaillants corps de héros antiques. J’ai été élevé et nourri dans le Nord ; tu devines qu’à leur aspect j’oubliais tou-