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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/284

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quet rouge sur l’arbre de vie ! L’arbre a une bosse, une espèce de marchepied sur lequel Adam monte. En revanche, dans son Triomphe de David, qui est à côté, le génie et le naturel sont jetés à pleines mains. On ne peut rien voir de plus charmant, de plus vivant que le groupe des femmes qui jouent des instruments ; une surtout, demi-penchée, étendant les bras, un sistre dans les mains, en tunique bleue, la jambe nue, s’élance avec un geste d’une grâce inexprimable : la chair est comme imprégnée de lumière ; impossible de trouver une pose qui mette la structure humaine, le bel animal qui déploie ses membres dans un plus beau jour. Toutes ces têtes sont jeunes, d’une grâce et d’une sincérité virginales, inventées. On voit un homme qui a un vrai cœur de peintre, qui a senti le beau tout seul et par lui-même, qui a cherché, qui a créé, qui est aux prises avec son idée, qui travaille de toute sa force pour la rendre, qui n’est pas un simple fabricant de figures comme le Guide. « Il ne cessait jamais, disent ses biographes, de fréquenter des endroits où se rassemblaient des quantités de gens, afin d’observer les attitudes et les expressions par lesquelles les sentiments intérieurs se manifestent. » On trouve partout chez lui cet effort, souvent trop grand, vers l’expression : tel est le geste irrité de Saül, qui tire violemment sa tunique. Le peintre a voulu montrer un jaloux qui se décèle à demi et se contient à demi ; mais la peinture rend mal les complications et les nuances des sentiments ; la psychologie n’est pas son affaire.

C’est dans ce palais que se trouve le célèbre plafond du Guide, celui qu’on appelle l’Aurore ; le dieu du jour est sur son char, entouré par le chœur des Heures dan-