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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/331

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22 mars, la bourgeoisie.


Je t’ai décrit à peu près tout ce que je puis observer par moi-même, le dehors : quant au dedans, je veux dire les mœurs et les caractères, tu comprends bien qu’au bout d’un mois je ne puis dire grand’chose de mon crû ; mais j’ai des amis de diverses classes et d’opinions diverses, tous très-complaisants, plusieurs très-judicieux. Voici le résumé de cinquante ou soixante conversations et discussions menées à fond et sans réticences.

Très-peu d’artistes dans cette ville peuplée d’œuvres d’art. Il y a trente ans, on avait M. Camuccini et des imitateurs froids de David ; aujourd’hui on tourne à la fadeur gracieuse ; les sculpteurs donnent au marbre un poli parfait pour plaire aux enrichis d’outre-monts ; c’est là leur fort, et ils ne vont guère au delà. La plupart sont des ouvriers qui confectionnent des copies. Le gros public est tombé aussi bas ; les Romains ne sentent leurs chefs-d’œuvre que par l’admiration des étrangers. C’est que la vraie culture leur est interdite. Impossible de voyager sans un passe-port du pape, et ce passe-port est souvent refusé. Un artiste italien qu’on