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Page:Taine - Voyage en Italie, t. 1, 1874.djvu/63

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Dans ces vastes caves, dans cette cité souterraine, gisent des colonnes précipitées par le tremblement de terre, pareilles à d’énormes troncs d’arbres. Les chevelures vertes des arbres pendent le long des parois ; l’eau en suinte comme une fontaine qui, goutte à goutte, tomberait des cheveux d’une naïade.



Promenade à Castellamare et à Sorrente.


Le ciel est presque clair ; seulement un banc de nuages pend au-dessus de Naples, et autour du Vésuve de grandes fumées blanchâtres tournoient ou dorment.

Je n’ai point encore vu, même en été à Marseille, cette couleur à la mer, tant le bleu en est profond, presque dur. Au-dessus du fort et luisant azur qui occupe les trois quarts de l’espace visible, le ciel est blanc et semble un cristal. À mesure que l’on s’éloigne, on aperçoit mieux la côte onduleuse, le grand corps de la montagne ; toutes les portions se tiennent comme des membres ; à l’extrémité, Ischia et les promontoires nus reposent dans leur teinte de lilas comme une dormeuse de Pompéi sous son voile. Véritablement, pour peindre une pareille nature, ce continent violet étendu au bord de la grande eau lumineuse, il faudrait prendre les paroles des anciens poëtes, figurer la grande déesse fertile que l’éternel Océan embrasse et assiège, et au-dessus d’eux la blancheur sereine, l’éblouissant Jupiter : Hoc sublime candens quem omnes invocant Jovem.

On rencontre sur la route quelques belles figures aux traits allongés et fins, tout à fait grecques, quelques belles filles noblement intelligentes, et çà et là de hi-