Aller au contenu

Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/441

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

opposées pourtant à l’instar des deux moitiés d’un portail gothique ou d’un fronton grec.

L’économie politique fournit de nombreux exemples de la transformation graduelle du rapport de co-adaptation en rapport d’opposition ou vice versa. La concurrence que se font deux ateliers, deux boutiques similaires, est une opposition mais en même temps, parfois, une collaboration, — involontaire, indirecte et accidentelle, — au progrès de l’industrie ou du commerce dont il s’agit, ou à la diminution des prix. Tout involontaire, indirecte et accidentelle qu’elle est, cette collaboration est ce qui donne à la concurrence sa raison d’être ; et, quand la concurrence ne provoque plus ni abaissement des prix ni perfectionnement de la production, elle tend à disparaître. Ces considérations s’appliquent à la guerre qui, dans la mesure - très exagérée, nous l’avons montré - ou elle peut servir accidentellement la cause de la civilisation, est une collaboration meurtrière des armées rivales. La rivalité de deux ateliers, et aussi bien de deux armées, se présente toujours comme un mélange à doses infiniment variées de concurrence et de collaboration. On peut dire, en général, que, lorsqu’une nouvelle boutique vient de s’ouvrir et d’entrer en lutte avec une boutique qui exerçait un monopole jusque-là, leur antagonisme est fécond, et la part de la collaboration l’emporte sur celle de la concurrence. Mais, par degrés, la première diminue et la seconde grandit jusqu’à ce que celle-ci opère seule et conduise à la destruction de l’un des deux rivaux par l’autre, ce qui rétablit le monopole primitif. — Est-ce que, mutatis mutandis, ceci ne s’applique pas aussi quelque peu à la guerre ?