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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/192

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bolique vise la multitude, en proie au scepticisme en ces tristes temps. Du scepticisme à l’athéisme, il n’y a qu’un pas. Mais Satan n’est pas seulement malicieux ; avant tout, il est le père de l’orgueil. « Non serviam ! » tel est le cri qu’il a poussé dans sa révolte. Aussi, son monstrueux orgueil est-il satisfait, lorsqu’il voit des hommes, fussent-ils des fous, lui rendre hommage. À ses adorateurs il se manifeste. Eh bien, il est bon de faire connaître ces manifestations. Les constater, c’est obliger le scepticisme à s’avouer vaincu. Par orgueil, tu te manifestes à tes élus, ô Satan ; des témoins surgissent, tu ne peux plus te faire nier ; car, si tu te manifestes, donc tu existes. Et si tu existes, toi l’archange déchu, si tu apparais, même en dupant tes fidèles et en leur faisant croire que tu es le principe du bien, si tu te montres aux adeptes de ta religion réthéurgiste ou palladique, eh bien, l’athéisme n’est plus soutenable. Tu es pris à ton propre piège, esprit du mal !

Là-dessus, je reviens à mon récit. Je me faisais à moi-même les observations transcrites plus haut ; et, tout en écoutant, en essayant de percevoir et de définir les bruits, mon regard errait dans le vague des ténèbres nocturnes ; je me tenais penché en avant, lorsque tout à coup je me redressai brusquement. Je venais d’éprouver une sensation à laquelle un observateur du spiritisme ne se trompe pas.

Cette sensation, je l’avais déjà éprouvée à Calcutta, pendant la messe luciférienne, au moment où le pentagramme tracé par des éclairs flamboya dans l’espace.

D’autre part, — j’en ai eu la confidence de tous les adeptes du Palladisme avec qui j’en ai causé, — cette sensation est éprouvée invariablement chaque fois que Lucifer ou l’un des chefs de ses milices est présent. Aucun spirite pratiquant, ayant assisté à une œuvre surnaturelle, ne niera ce que je vais dire.

Ceci est réglé, fatal, absolu. C’est le critérium de la présence d’un esprit infernal. Chaque fois que, dans une société de sectaires lucifériens ou de spirites gens du monde, je n’ai pas éprouvé cette sensation, j’ai reconnu sur-le-champ ou ensuite que les prestiges dont j’étais témoin n’étaient que supercherie. Toutes les fois, au contraire, que cette sensation s’est produite, il m’a été impossible de découvrir un truc quelconque, et j’ai été obligé d’admettre l’action du surnaturel.

Les lucifériens et les spirites, même les spirites amateurs, les évocateurs opérant dans un salon, entre amis, ne me contrediront pas, je le répète. C’est par là qu’ils discernent s’il y a jonglerie, charlatanisme, ou phénomène réel.

C’est d’abord une vague sensation de tremblement général, qui peut aller presque jusqu’au frisson, accompagné de chaleur intermittente et