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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/310

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d’ordre administratif ; ce Kadosch-là saura tout, et l’autre, tout 33e qu’il soit, ne saura rien. C’est ainsi que la secte se joue de tant et tant d’adeptes, qu’elle conduit aux plus hauts grades connus, se servant d’eux alors qu’ils croient se servir d’elle, leur donnant « l’anneau », cet anneau qui les désigne aux vrais initiés comme frères peu perspicaces et qu’il est nécessaire d’entretenir dans de douces illusions, en un mot, les bafouant, les mystifiant, ne leur apprenant pas le secret des secrets, puisque d’eux-mêmes ils ne l’ont pas compris.

Je ne citerai qu’un cas de cet aveuglement dans lequel les chefs secrets de la haute maçonnerie se plaisent à tenir ceux de leurs initiés qui ont reçu l’anneau ; mais ce cas est caractéristique.

Il s’agit de M. Paul Rosen, 33e du Rite Écossais, qui ne sera certes pas suspect de ménagement envers la confrérie trois-points ; car, depuis quelques années, il a publié contre elle un certain nombre de volumes où l’on rencontre par-ci par-là des documents qui ne manquent pas d’intérêt.

M. Rosen, qui est juif et qui a même été rabbin, à ce que l’on m’a assuré, s’affilia, en outre, à la franc-maçonnerie, à une époque où il haïssait de toute son âme le catholicisme ; ce qu’aujourd’hui il regrette sans doute, j’aime à le croire. Je ne sais pas quel suprême conseil lui conféra le 33e degré ; en tout cas, ce n’est aucun de ceux que j’ai visités, attendu que je n’ai trouvé trace de son initiation à ce grade dans nulles archives à ma connaissance ; mais il est juste de dire qu’au temps où je pouvais mettre mon nez un peu partout je ne me préoccupais guère du F∴ Rosen ; son inscription a donc pu fort bien m’échapper.

Quoi qu’il en soit, soit qu’il ait passé par toute la filière, soit qu’il ait trouvé, comme tant d’autres, deux haut-gradés assez complaisants pour lui céder (contre finances, bien entendu, en maçonnerie rien ne se donne) une patente de 33e, il a ce titre ou, du moins, il l’a eu.

Plus tard, — bien tard, dirai-je, car M. Rosen n’est pas de la première jeunesse, — il a renoncé à la maçonnerie, à ses pompes, à ses œuvres. Les lauriers d’Andrieux et de Léo Taxil l’empêchant de dormir, il fit un coup d’éclat et vint grossir la phalange des écrivains anti-maçonniques.

Certes, il a rendu service à la cause sainte de la religion ; ceci est indiscutable ; et je serai toujours des premiers à louer son initiative et même à le défendre contre ses ex-frères qui, du jour où ils ont constaté qu’il leur tournait le dos, l’ont vilipendé, traduit et leur barre, et, au lieu de l’expulser franchement pour anti-maçonnisme subit, ont tenu à le radier dans des conditions qui seraient déshonorantes pour lui, si les accusations portées en de telles circonstances n’étaient pas calomnieuses. Et c’est bien là, vraiment, la franc-maçonnerie : soyez pour elle, vous