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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/311

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êtes le nec plus ultra de l’humanité ; soyez contre elle, vous êtes le dernier des êtres parmi les plus vils.

Voilà donc un homme qui a fait tout son possible pour apporter la lumière aux profanes, pour leur faire connaître les mystères du temple d’Hiram. Et pourtant, quand on examine de près son œuvre, en voit qu’en dépit de ses coupures de journaux maçonniques, il n’a rien révélé de sérieux, d’important. Pourquoi ? parce qu’il ne savait rien, « parce qu’il avait reçu l’anneau ».

Il s’est livré à une besogne de bouquiniste ; il a ramassé, de droite et de gauche, des circulaires, des brochures, des discours (plus ou moins authentiques), des articles de revues officielles de grands orients et de suprêmes conseils ; et de tout cela il a fait une salade, qui ne pouvait pas produire une forte émotion chez les sectaires, puisqu’il ne dévoilait que ce qu’aujourd’hui ils ne cachent plus.

Ce qui lui manquait, à M. Rosen, c’était la clef, c’est-à-dire l’affiliation luciférienne au Palladium de Charleston, le droit de montrer patte blanche pour être reçu dans les loges androgynes, l’autorité nécessaire pour commander à des ultionnistes ou arrêter leur bras. Tout 33e qu’il était, il ignorait la personnalité du grand architecte, l’existence des sœurs d’adoption et autres, et jusqu’aux crimes maçonniques, aujourd’hui indiscutés. Si bien, qu’il s’est trouvé de simples profanes, qui, avant compris, eux, le grand secret, ayant eu la patience de collectionner des documents et l’intelligence de lire entre les lignes, comme le père Deschamps, comme M. Claudio Jeunet, comme Mgr Fava, comme dom Benoit, comme Mgr Meurin, ont découvert et divulgué cent fois plus que M. Rosen, 33e.

Les sœurs maçonnes ?… Ce pauvre M. Rosen en a ignoré l’existence jusqu’en 1888, et il y avait alors au moins trente ans qu’il gâchait du mortier pour reconstruire le temple de Salomon, s’il est aussi vieux maçon qu’il le dit. Oui, certes, en 1888, ce naïf 33e niait publiquement les loges androgynes ; et il était de bonne foi, personne n’ayant voulu le désigner pour l’admission. Mais, deux ans après, il apprenait indirectement qu’on s’était moqué de lui jusqu’alors, et que ces sœurs maçonnes qu’il n’avait jamais vues existaient pourtant bel et bien. Alors, il écrivit dans son volume l’Ennemie Sociale qu’il y avait sur le globe « 2,850,000 femmes appelées Sœurs-Maçonnes » ; chiffre mis un peu trop au hasard, et que je rectifierai en entrant dans les détails. Mais l’intention y était ; il faut lui en savoir gré. Quoique ne publiant aucun rituel de la maçonnerie féminine, quoique n’expliquant même pas ce qu’étaient ces sœurs maçonnes dont il donnait un total, au petit bonheur, il est juste de tenir compte à M. Rosen de son aveu, si tardif et si incomplet qu’il ait été.