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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/312

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Sur la question des crimes ordonnés et exécutés par la haute maçonnerie, même ignorance chez M. Rosen. Son dernier livre, l’Ennemie Sociale, a plus de cent pages consacrées à « la franc-maçonnerie en Italie ». Cette partie importante est divisée en trois chapitres, intitulés : 1° « Origine et développement de la franc-maçonnerie en Italie » ; 2° « l’exploitation de la franc-maçonnerie en Italie » ; 3° « l’action de la franc-maçonnerie en Italie ». Or, s’il est un pays où des assassinats ont été commis par la secte, c’est bien celui-là. M. Rosen les ignore, ne fait mention d’aucun d’eux ; il ne cite même pas l’assassinat du comte Pellegrino Rossi, ce franc-maçon converti dont Pie IX fit son premier ministre et qui, le 15 novembre 1848, tomba sous le poignard des ultionnistes désignés par les chefs sectaires. Ce crime est historique : on sait que la mort de Rossi avait été délibérée et décidée le 10 octobre, à Turin, dans un conciliabule maçonnique présidé par Mazzini ; on sait qu’à Rome, le 14 novembre, veille de l’assassinat, les ultionnistes s’étaient procuré, à l’hôpital San-Giacomo, un cadavre de la taille du ministre condamné à périr, et que ce cadavre, maintenu debout, dressé contre un portant, leur servit à se faire la main ; on sait que la leçon criminelle fut donnée, salle Capranica, au F∴ Sante-Costantini, que le sort avait désigné pour être le meurtrier ; on sait, en un mot, tous les détails de cet abominable forfait, accompli en plein jour. Quelle belle page M. Rosen aurait eu à écrire sur cet épisode tragique, dans son chapitre de « l’action de la franc-maçonnerie en Italie », s’il avait été tant soit peu renseigné ! Mais non, on lui a affirmé, dans sa loge, que l’ordre maçonnique répugnait à verser le sang, et naïvement il l’a cru ; on a traité devant lui de calomniateurs les écrivains qui ont accusé la secte de se vautrer dans le crime, et il s’est bien gardé, dans ses ouvrages, de faire la moindre allusion aux ultionnistes, de citer un seul des nombreux assassinats dont l’odieuse société secrète s’est souillée ; 33e avec l’anneau, il ne savait rien de tout cela.

Quant à la pratique du culte luciférien dans les triangles palladiques, il ne pouvait pas s’en douter, n’ayant jamais pénétré au sein d’une arrière-loge occultiste. Bien mieux, M. Rosen, que ses frères ont berné dans des proportions fantastiques, croit que la doctrine de la haute maçonnerie, loin d’être la déification de Satan, est le naturalisme matérialiste. Il fait prêcher par Albert Pike lui-même que « le vrai Dieu, c’est la raison pure dans la nature » ; or, Albert Pike, le grand organisateur du luciférianisme dans les arrière-loges, n’a jamais écrit, jamais ! pareille sentence. Il trouvait même que l’expression « grand architecte de l’univers » était trop vague et devait être abandonnée dès le grade de Rose-Croix ; il a officiellement proposé au Grand-Orient de France, à