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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/666

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lesquelles elle semble confiner et côtoyer la folie ; parlons, enfin, des formes généralisées ou pour ainsi dire épidémiques. Nous aurons ainsi parcouru tous les échelons de cette échelle pathologique si bizarre en sa structure, et nous serons allés du simple geste impulsif étriqué à la plus grandiose des folies humaines, du modeste tic habituel de l’épicier du coin au char de Djagghernaath de l’Inde, c’est-à-dire à l’hystérie d’un peuple tout entier.

On désigne sous le nom de formes frustes d’une maladie, celles qui ne paraissent avoir avec elle qu’un rapport très éloigné au premier aspect et en différer même totalement. Il est des maladies, — l’ataxie locomotrice, par exemple, pour en prendre une dans le domaine nerveux de la vie de relations, — qui ne se manifestent tout d’abord que par des symptômes, pour le diagnostic desquels il faut une très grande sûreté de jugement et une très grande connaissance des cas. C’est ainsi qu’un ataxique aura, pendant dix, quinze, vingt ans avant sa maladie, des crises gastriques qui seront prises par des médecins inhabiles pour des symptômes de gastrites ou de gastralgies ; mais un homme intelligent et expérimenté y reconnaîtra, du premier coup d’œil, à certains caractères de ces crises, un début éloigné, une forme fruste, larvée encore, de l’ataxie locomotrice, laquelle éclatera plus tard suivant sa forme classique, ou qui pourra ne pas éclater aussi, bien entendu, mais qui n’en existera pas moins en puissance chez le sujet. Eh bien, il en est de même pour l’hystérie. Mais ici un moyen de contrôle et de diagnostic des plus simples va nous permettre de cantonner dans son domaine tout ce qui lui appartient légitimement ; et ce moyen, c’est l’inconscience.

L’inconscience est, le lecteur ne l’a pas oublié, une des caractéristiques principales de l’hystérie. Dans la grande névrose, le malade est automatique et agit pour ainsi dire mécaniquement.

Une grande partie de nos actes inconscients, automatiques, ressortissent donc, on peut l’affirmer sans crainte de se tromper beaucoup, de l’hystérie, en sont les formes frustes, larvées, la menue monnaie quotidienne, si l’on peut s’exprimer ainsi.

Il ne s’ensuit pas que l’homme qui les possède doive fatalement devenir un jour un hystérique classique ; mais il y a cent à parier et à gagner contre un qu’il est un prédisposé, un sujet en puissance, en possibilité, en instance même de dérangement fonctionnel du système nerveux du grand sympathique.

Au nombre de ces formes frustes, il faut ranger d’abord les tics, et principalement ceux que l’on a appelés les « tics coordonnés », qui sont du domaine de la vie ordinaire et que tout le monde reconnaîtra.

Ces tics-là, une quantité innombrable de gens en effet les ont plus