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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/712

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importance la couvre d’une protection étrange, au point de châtier ceux des autres occultistes qui se permettraient contre cette préférée la moindre méchanceté, ou qui noueraient, pour lui nuire dans la secte, une de ces malveillantes intrigues de coterie, si nombreuses, si habituelles au sein des sociétés secrètes.

À cet égard, le fait, tout contemporain, de Diana Vaughan (de Louisville), fait universellement connu dans le monde des spirites lucifériens, est surprenant au plus haut degré, dépasse tout ce qu’on peut imaginer comme bizarrerie du surnaturel diabolique ; et je ne sais rien d’aussi singulier que la situation de cette jeune femme carrément protégée contre les sectaires eux-mêmes par un démon de la hiérarchie supérieure.

Diana Vaughan serait-elle une possédée à l’état latent ? me demandera-t-on. — Pas le moins du monde. Jamais l’esprit malin, qui lui accorde cette préférence dont tous les palladistes sont déroutés, n’a pénétré en elle.

Est-ce une pauvre fille jetée là par accident, n’osant essayer de s’arracher à l’abîme et se contentant peut-être d’invoquer le vrai Dieu en elle-même ? et alors, ces aveugles, qui attribuent aux anges du ciel les coups dont ils sont parfois gratifiés par les esprits infernaux, n’attribueraient-ils pas, en proie à une erreur semblable, cette protection exceptionnelle à Lucifer ou à l’un de ses subalternes, tandis qu’en vertu d’une grâce divine cette sauvegarde inespérée serait le fait de la Providence, toujours mystérieuse dans ses desseins ? — Non, répondrai-je encore. L’étrange privilégiée de Louisville, née en dehors de la religion catholique, ayant vécu dès son plus jeune âge dans un milieu foncièrement hostile au catholicisme, le considérant elle-même comme l’adversaire qu’il s’agit d’abattre, ne croyant à aucun de nos dogmes sacrés, n’a certainement (tel est du moins mon avis) pas le moindre titre à la faveur de Dieu. Sa doctrine est celle du gnosticisme pur ; c’est à Lucifer Dieu-Bon qu’elle croit, exactement comme tout palladiste parfait initié ; en outre, elle n’est pas d’un caractère faible, mais elle possède, au contraire, une étonnante somme d’énergie dont elle a donné bien des preuves et qui lui a valu l’inimitié profonde de Sophie Walder ; car, entre ces deux femmes, il y a une rivalité sourde. Je ne dirai pas que c’est une haine réciproque ; Diana n’est pas haineuse ; mais elles sont, par rapport l’une à l’autre, comme l’eau et le feu, comme le chien et le chat. Enfin, il suffit de connaître l’histoire de Mlle Vaughan pour se rendre compte que, dans son fait, c’est-à-dire dans le surnaturel qui se produit à son propos, c’est absolument et uniquement l’action démoniaque qui se manifeste.

Cette histoire, qui ne date pas du moyen-âge, qui est d’hier, d’aujour-