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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/875

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crilège et autres cas et crimes abominables, d’une part, et maître Urbain Grandier, prêtre, curé de l’église de Saint-Pierre du Marché de Loudun, et l’un des chanoines de l’église Sainte-Croix dudit lieu, prisonnier défendeur et accusé d’autre part :

« Nous, sans avoir égard à la requête du onzième du présent mois d’août, avons déclaré et déclarons ledit Urbain Grandier duement atteint et convaincu du crime de magie, maléfice et possession arrivée par son fait ès personnes d’aucunes des religieuses ursulines de cette ville de Loudun, et autres séculières mentionnées au procès ensemble des autres crimes résultans d’iceluy, pour réparation desquels, iceluy Grandier, condamné et condamnons à faire amende honorable nue tête et en chemise, la corde au col, tenant en ses mains une torche ardente du poids de deux livres, devant les principales portes des églises de Saint-Pierre du Marché et Sainte-Ursule de cette dite ville, et là, à genoux, demander pardon à Dieu, au Roy et à la Justice, et, ce fait, être conduit en la place publique de Sainte-Croix de cette dite ville, pour y être attaché à un poteau sur un bûcher, qui pour cet effet sera dressé au dit lieu, et y être son corps brûlé vif, avec les pactes et caractères magiques étant au greffe : ensemble le livre manuscrit par lui composé contre le célibat des prêtres, et les cendres jetées au vent. Avons déclaré et déclarons tous et un chacun ses biens acquis et confisqués au Roy, sur iceux préalablement pris la somme de cent cinquante livres pour être employé à l’achat d’une lame de cuivre, en laquelle sera gravé le présent arrêt par extrait, et icelle apposée dans un lieu éminent en ladite église des Ursulines, pour y demeurer à perpétuité ; et auparavant qu’être procédé à l’exécution du présent arrêt, ordonnons que ledit Grandier sera appliqué à la question ordinaire et extraordinaire, sur la vérité de ses complices.

« Prononcé et exécuté le dix-huitième jour d’août, 1634. »

Le père Surin raconte ainsi les derniers moments du condamné.

« Quand on lui eut prononcé l’arrêt de mort, il pria M. de Laubardemont de modérer la rigueur de la sentence. La réponse fut que le meilleur moyen d’obtenir cette grâce de la justice était de dire ingénuement ses complices, et de produire des actes de contrition d’un cœur sincère. Il répondit qu’il n’avait point de complices. Un père exorciste qui était présent lui fit un discours fort tendre qui tira les larmes des yeux de tous les assistants. Grandier seul n’en fut point touché… Rien ne put toucher ce malheureux cœur ; et il fut si endurci qu’il chantait une chanson profane deux heures avant d’aller au supplice.

« Quand il y fut arrivé, un père capucin lui présenta le crucifix, dont il détourna la tête. On le pressa de se confesser, il répondit qu’il n’en