Aller au contenu

Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/936

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour entreprendre « licite » l’exorcisme à Wemding, nous avions besoin de l’autorisation de l’évêque Léopold d’Eichstætt. Elle nous fut accordée le 10 juillet. Ainsi armés des pleins pouvoirs de l’évêque nous mandâmes les parents et l’enfant, le 13 juillet, jour où commença l’exorcisation.

(B) exorcisation solennelle

Anxieux, mais confiants dans le secours divin, nous entreprîmes, nous P. Remigius et P. Aurelian, l’exorcisme solennel, le 13 juillet à 7 heures du matin, pour la première fois. Au préalable, nous avions fait fermer l’église, d’un côté pour n’offrir aucune occasion à la curiosité publique dans cette première tentative, de l’autre pour n’avoir pas à rougir devant la foule, au cas où le malin esprit voudrait révéler certains secrets, même mensongers, comme il l’avait fait au vicaire de Durrwangen quand celui-ci avait autrefois béni l’enfant. Toutefois, nous laissâmes dans l’église, à titre de témoins, les parents du possédé, un certain marchand d’ici M. Pscherr, notre frère lai et le portier du couvent. Quelque temps avant le commencement de l’exorcisation, l’enfant se mit à souffleter ses parents d’une manière indescriptible. Nous dîmes de l’apporter dans le sanctuaire, et alors se joua une scène véritablement horrible. D’abord, quand on voulut exécuter notre ordre, le possédé se mit à pousser des cris effroyables « ein furchterliches geschrei ». On aurait dit, non la voix d’un homme, mais bien celle d’un animal sauvage. Ces cris étaient tellement violents que ce rugissement — l’expression n’est pas trop forte — fut entendu à plus de cent mètres en dehors de l’église du couvent, et tellement abominable que tous ceux qui les entendirent furent remplis d’horreur. Une telle scène laisse deviner quelle fut notre émotion. Et cependant la suite devait être encore plus effrayante. Quand le père voulut apporter son fils dans le sanctuaire, il fut moins fort que son faible enfant. Ce faible enfant jeta son vigoureux père par terre avec une telle force, qu’une profonde inquiétude nous saisit tous. Enfin, après une longue lutte, le père put l’apporter, grâce à l’aide des témoins sus-nommés et de notre frère lai Macarius qui déployaient toutes leurs forces. Par mesure de prudence, nous lui fîmes lier les pieds et les mains avec de fortes courroies ; mais il remuait ses membres comme s’il n’avait pas eu d’entraves. Après ces préparatifs, nous nous décidâmes à commencer l’opération pleins de confiance dans l’assistance d’En-Haut. Nous procédâmes à l’exorcisme selon le grand rituel d’Eichstætt, et exposâmes la sainte Croix. Nous bénîmes l’enfant avec celle-ci et l’enfant se remit à pousser des cris affreux. En outre, il ne cessait de cracher sur la Croix et sur les P. Remigius et Aurelian, dans l’exercice de leurs fonctions. Ces cris et ces crachements durèrent ininterrompue jusqu’au récit des litanies des Saints. Ensuite, nous récitâmes en latin les formules d’exorcisme. Toutes nos questions restèrent sans réponse. Montrant le plus grand mépris pour nous, l’enfant nous crachait au visage chaque demande. Le malin esprit voulait sans aucun doute, par ce mépris, nous forcer à cesser l’exorcisme ; mais, grâce à la force que Dieu nous avait donnée, nous ne nous laissâmes pas effrayer et poursuivîmes la cérémonie. Lorsque, conformément au rituel, nous passâmes l’étole violette autour du cou de l’enfant, nous pûmes dédaigner l’esprit immonde. Ce signe, en effet, qui exprime la puissance du prêtre, lui causa de monstrueuses douleurs qu’il exhala en