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Page:Tinayre - Figures dans la nuit.pdf/129

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LÉGENDE DE DUCCIO ET D’ORSETTE

danger. La charité les transportait, brûlante comme l’incendie, et non toute pure cependant de complaisance et d’humaine curiosité, parce que ces novices étaient encore des enfants par l’âge et faciles à divertir. Parvenus au village dont les maisonnettes flambaient, ils firent bravement leur office. Les uns démolirent les murs qu’on ne pouvait plus défendre, afin de préserver le reste ; les autres sauvèrent les gens et les bêtes. Avant l’aurore, le feu fut vaincu. Les paysans baisèrent les robes brûlées des Frères qui reprirent la route du couvent. Tout était bleu, paisible et frissonnant, dans le suave silence de l’aube où montait l’odeur du thym mouillé. Quelques étoiles parsemaient le ciel d’une rosée lumineuse. Des Alpes de la Serre au Pratomagne, la vallée n’était qu’un lac de brume et les crêtes émergeantes se dissolvaient en molles vapeurs. On eût dit que la figure du monde terrestre avait passé comme un rêve, et que demeurait seulement, perdue dans l’infini du ciel, la montagne franciscaine avec ses noires forêts, son monastère et ses deux églises.

Les jeunes Frères, las et ravis, goûtaient l’heure angélique de l’avant-matin ; et le Père