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Page:Tinayre - Figures dans la nuit.pdf/130

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FIGURES DANS LA NUIT

Bénédict tirait des moindres circonstances un motif d’édification.

– Voyez, disait-il, mes petits frères, voyez les bêtes de la nuit, la chouette grise et la chauve-souris au vol anguleux. Comme elles fuient le soleil, devant même qu’il ne soit levé, et sitôt qu’elles pressentent l’ascension de sa face vermeille ! Ainsi nos mauvaises pensées et nos vains désirs, dès que le soleil de l’amour divin touche nos âmes obscures…

Et il disait encore :

– Ô mes petits frères, que vous avez peine à marcher ! Les ronciers accrochent vos vêtements et les chardons acérés déchirent cruellement vos pieds nus. Mais considérez que ces ronciers fleuriront demain en belles corolles blanches, et regardez la couleur de ces chardons bleus comme le ciel ou violets comme la campanule des bois. N’est-ce pas l’emblème de la pénitence religieuse, tant de rudesse et tant de douceur mêlées ? Béni soit Dieu qui fait naître la rose de l’épine, et qui peint le chardon acerbe aux couleurs mêmes du Paradis !

Ainsi parlait le bon Père, et les jeunes novices, émerveillés, louaient le Seigneur dans ses œuvres.