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Page:Tinayre - Figures dans la nuit.pdf/142

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FIGURES DANS LA NUIT

saint François, remuaient dans son cœur les cendres encore chaudes de sa vertu consumée. Il sentait la pointe d’un remords et ce spasme de la gorge qui précède les larmes. Surtout, il lui était impossible de voir, sans souffrance, le mont de la Verne, bleuâtre parmi les cimes lointaines, lorsqu’il s’égarait en chevauchant dans la campagne et remontait la rive de l’Arno.

Malgré ces répugnances qui lui restaient de son premier état, Duccio n’avait plus la chasteté du cœur, et il ne put garder celle du corps. Il avait cherché vainement l’Orsette, sans savoir ce qu’il voulait d’elle, et ne la pouvant trouver, il dédaignait les autres femmes. Un soir, il tomba aux mains d’une fille qui avait des cheveux blonds et des yeux verts. Le lendemain, elle le dégoûta. Le surlendemain, il en prit une autre.

Dès lors, il lâcha la bride à sa frénésie amoureuse, et jura qu’il posséderait l’Orsette, dût-il la rejoindre dans le grand feu de l’enfer où le diable les marierait. Il la convoitait par amour et par haine, comme la cause de sa damnation, et il se consolait – le malheureux ! – de ses fautes abominables, parce qu’il se rapprochait ainsi, lui