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Page:Tinayre - Figures dans la nuit.pdf/170

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FIGURES DANS LA NUIT

avec la maison, mais je m’en console en pensant que je vis au siècle des lumières et que nous commençons l’âge d’or.

— Salut et fraternité, citoyen Le Guilvic. Je m’excuse de venir ainsi, sans m’être annoncé, m’asseoir à votre foyer, pour une heure, mais je me suis remémoré l’invitation que vous me fîtes, en brumaire, lorsque j’eus l’honneur de vous voir à Brest, et certaines circonstances me conduisant par ici…

— Hé, citoyen, je suis charmé de te recevoir.

Un rire grinça, comme le cri d’une girouette rouillée.

Au seuil de la « salle », dont la porte jouait dans un encadrement de granit à moulures, surmonté d’un écusson, se tenait un petit vieillard enveloppé d’une houppelande brune. Son corps était si grêle que ses jambes semblaient dénuées de chair dans les bas de laine bleue tout reprisés. Sur son crâne, un peu de travers, une perruque jadis blanche était posée, qui avait pris le ton jaunâtre d’une vieille toison de brebis. L’ample rondeur du front tendait la peau luisante comme du parchemin et partout ailleurs burinée de rides très fines. Le nez, aussi des-