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LA SIRÈNE DE KERDREN

rons du port… Le citoyen Jacquin affirme me reconnaître, et, moi, j’affirme qu’il a été la dupe d’un coquin… ou qu’il a rêvé… Car un homme de bon sens peut bien admettre qu’un quidam joue le rôle de sosie, pour des raisons inconnues, mais que ce sosie possède ma boîte, mes habits, mes papiers, toutes choses que je n’ai pas quittées un seul instant, depuis mon départ de Landerneau, cela passe l’imagination ! Il faudrait croire que j’ai le don d’ubiquité, comme le fameux curé Trentiniac qui est signalé par les uns en Vendée, et par les autres en Angleterre.

— Votre citoyen Jacquin est un sot. Quelqu’un s’est moqué de lui, sans doute, en lui présentant n’importe quel papier. Sait-il lire seulement, ce citoyen ? Et s’il sait lire, connaît-il l’orthographe ? Il a pris la boîte d’un colporteur pour la boîte d’un minéralogiste…

— C’est qu’il me voulait mettre en prison, et déjà la populace se rassemblait sous la fenêtre… J’ai pu me tirer des mains de cet imbécile et je me plaindrai au Directoire de Brest…

— Bah ! dit M. de Kerdren, soyez généreux ! Votre Jacquin est de bonne foi, comme