ves gens. Quand Bonnefont passe, avec son sac, chacun dit son mot, sans méchanceté. Sotte fantaisie, vraiment, que d’aller porter ou quérir des chaussures chez les pratiques, à cette heure nocturne ! Mais, puisque Bonnefont est un peu fou, rien de lui n’étonnera jamais ses compatriotes, et, de lui, tout les amuse.
— Tais-toi, petitoun ! dit une mère, gourmandant un enfant criard. Si tu geins, j’appelle le bonhomme ! Il t’emportera dans son sac !
Et Bonnefont, transformé en épouvantail, répond d’une voix sépulcrale :
— Mon sac est plein de méchants drolles et je les mange tout crus.
Ailleurs, c’est un vieil ouvrier de la manufacture, le père Borie, qui interpelle son ancien camarade.
— Hé ! Bonnefont, où vas-tu ? Prendre mesure aux pieds du loup-garou ? Les honnêtes gens ne travaillent point, à cette heure. Entre chez nous, viens boire un verre.
— Je te remercie, Martial Borie. Je suis attendu.
— De quel côté ?
— Par là…
Un geste vague… Le vieil ouvrier, à la