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Page:Tinayre - Figures dans la nuit.pdf/90

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FIGURES DANS LA NUIT

qu’on m’a faits, je me représente, dans ce lieu austère, Maxime, digne et barbu, tout gonflé de sa science, tout orgueilleux de sa chasteté, invectivant contre les débauchés et les courtisanes, et près de lui, la charmante Sosipatra, simplement vêtue, sans fard, sans parfums, écoutant Maxime et ne le voyant point parce qu’elle découvre, au plus secret de son cœur, un mystère… Elle ne s’indigne pas. Elle lève de beaux yeux ingénus, comme des yeux de petite fille.

– Ah ! je comprend tout !

– Tout ? Que veux-tu dire ?

– Je ne soupçonnais pas que mon cousin Philométor fût un si grand magicien, ô Maxime ! Tu prétends qu’il est un piètre philosophe. J’affirme, moi, qu’il nous dépasse tous dans la pratique des enchantements, et je ne doute pas qu’il n’ait ensorcelé cette Jacinthe, puisqu’il a pu, à l’insu de tous et à mon insu, m’ensorceler moi-même… Hé, oui ! dès la première fois qu’il vint dans cette maison, il commença de me jeter un sort. Quand il me regardait, j’avais un nuage sur les yeux, un tourbillon dans la tête, le creux des mains glacé, les genoux tremblants. Et cet état, qui aurait dû m’être pénible, me