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Page:Tinayre - La Rancon.djvu/45

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ne voulait entendre ni les reproches, ni les plaintes, ni le rappel à la réalité, ni la chute du cercueil de la jeunesse dans les eaux profondes… La jeune femme, étonnée, le regarda :

— Vous ne voulez pas continuer ?

— C’est que j’ai écrit la première moitié seulement de mon étude… Nous réserverons la fin des Lieder pour une autre séance…

— Alors, je vous écoute, dit-elle en s’appuyant au piano…

Il lut les petites analyses délicates et subtiles qu’il consacrait aux premiers Lieder. La jeune femme discuta certaines opinions avec une déférence timide. Étienne répondit.

— Voilà ce que vous devriez écrire, s’écria Jacqueline quand il eut parlé… Votre article est très bien, mais cette causerie est plus vivante, plus intéressante encore. Pourquoi n’avoir pas dit tout cela ?

— Pourquoi ?… Le sais-je ? J’ai beau jouer cent fois de suite les Dichterliebe, l’émotion esthétique, seule, me saisit… En vous écoutant, tout à l’heure, je vivais les Amours du poète.

Il se tut comme s’il craignait d’en trop dire.

— Enfin, dit-elle, notre pacte tient toujours. Je vois que vous ne me traitez plus en petite fille…