Aller au contenu

Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 2.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J’ai dit ailleurs que le véritable lien entre l’Européen et l’Indien était le métis ; de même la véritable transition entre le blanc et le nègre, c’est le mulâtre : partout où il se trouve un très grand nombre de mulâtres, la fusion entre les deux races n’est pas impossible.

Il y a des parties de l’Amérique où l’Européen et le nègre se sont tellement croisés qu’il est difficile de rencontrer un homme qui soit tout à fait blanc ou tout à fait noir : arrivées a ce point, on peut réellement dire que les races se sont mêlées ; ou plutôt, à leur place, il en est survenu une troisième qui tient des deux sans être précisément ni l’une ni l’autre.

De tous les Européens, les Anglais sont ceux qui ont le moins mêlé leur sang à celui des nègres. On voit au Sud de l’Union plus de mulâtres qu’au Nord, mais infiniment moins que dans aucune autre colonie européenne ; les mulâtres sont très peu nombreux aux États-Unis ; ils n’ont aucune force par eux-mêmes, et dans les querelles de races, ils font d’ordinaire cause commune avec les blancs. C’est ainsi qu’en Europe on voit souvent les laquais des grands seigneurs trancher du noble avec le peuple.

Cet orgueil d’origine, naturel à l’Anglais, est encore singulièrement accru chez l’Américain par l’orgueil individuel que la liberté démocratique fait naître. L’homme blanc des États-Unis est fier de sa race et fier de lui-même.

    compter qu’ils n’eussent pas accordé l’acte d’émancipation que la mère patrie vient d’imposer.