Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol24.djvu/129

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roles qui n’ont pas été dites. Il suffit seulement de comprendre le mot ennemi dans le sens de peuple ennemi et prochain dans le sens de compatriote pour que cette difficulté disparaisse. Christ dit de quelle manière, d’après la loi de Moïse, il est prescrit aux Hébreux de se comporter avec les peuples ennemis. Tous ces passages dispersés dans les divers livres des Écritures, où il est prescrit d’opprimer, de tuer, d’exterminer les autres peuples, Christ les résume d’un mot : haïr — faire du mal à l’ennemi. Il dit : Vous avez entendu qu’il faut aimer les siens et haïr les peuples ennemis : et moi je vous dis : Aimez tous les hommes, à quelque nationalité qu’ils appartiennent. Et aussitôt que j’eus compris ainsi ces paroles, aussitôt disparut la difficulté principale, la manière dont il faut comprendre les paroles : aimez vos ennemis. On ne peut aimer ses ennemis personnels. Mais on peut aimer les hommes d’une nation ennemie, à l’égal de ses compatriotes. Pour moi il devenait évident que Christ a dit que les hommes sont tous habitués à considérer leurs compatriotes comme le prochain et les étrangers comme des ennemis, et qu’il réprouve cela. Il dit : La loi de Moïse établit une différence entre l’Hébreu et le non Hébreu — qui est l’ennemi, et moi je vous dis : ne faites pas cette différence. Et, en effet, d’après Matthieu et Luc, aussitôt après ce commandement, il est dit que pour Dieu tous les hommes sont égaux,