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Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/140

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ce que ma compagne appellerait, en son ramage, « un peu de chichis ».

De quelques jours nous n’avions été quittes des deux marquis : devant les Tintoret ; à Saint-Marc, caverne d’ombre et d’or où des pirates enchâssèrent dans la mosaïque tout un butin de marbre ; sur le Lido lépreux, ils étaient là, à droite, à gauche, le plus vieux qui tâchait à démarquer Casanova pour s’en composer des aventures ; et l’autre, Dolcini, couvant Nane de l’humide silence de ses yeux : en vérité, il eût été assis sur un gros œuf que je ne lui aurais pas trouvé l’air plus bête. Mais Nane le considérait avec bienveillance.

L’autre soir, prise de migraine, elle monta se coucher au sortir de table, et me laissa seul au salon. Gondolphe, entré presque aussitôt, me mit en soupçon par tant de hâte qu’il n’y eût complot, peut-être, pour m’endolciner. De l’empêcher ou de le surprendre, je choisis le second, pensant que ce me serait une vengeance à la fois amère et douce de planter là cette perfide, en proie à son Italien.

Plus j’y réfléchissais, plus mes doutes prenaient figure de certitude. Nane devait avoir accepté rendez-vous au dehors, et, pourvu