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Page:Toulet - Mon Amie Nane, 1922.djvu/60

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tout un chapelet de parents et d’amis qui la dégoûtaient un peu. Il lui parut qu’une couronne de marquise, un château poitevin, un vieil hôtel rue de Bellechasse devaient, avec Dieu, suffire à la garder des siens ; et il n’était pas désagréable d’acheter le marquis avec, quand c’était comme celui-ci un beau gars, un peu massif, mais d’une vigueur élégante.

Elle sentait bien qu’il ne l’aimait pas, qu’il en était très loin, au delà même de l’indifférence ; et elle était assez pénétrante pour démêler sous sa politesse quelque chose qui ressemblait plutôt à de l’aversion. Mais ne pouvait-elle pas le conquérir plus tard ? Son imagination, déjà avertie, lui faisait voir, dans un corps aussi magnifiquement ordonné que le sien pour l’œuvre de la chair, les conditions secrètes d’un plaisir assez puissant pour faire oublier le bonheur.

Il y avait un motif moins pur encore aux projets de Georgette, et qui en dit trop long sur certaines vierges modernes pour ne le pas dévoiler. C’est qu’une de ses amies, plus âgée qu’elle et mariée, ayant pris, pendant quelques mois, Jacques pour amant, avait eu l’indiscrétion inusitée de venir le conter à la jeune fille : peu à peu elle avait fini