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Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/257

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— Quoi ? Que voulez-vous ? Parlez, dit-il d’une voix nasillarde.

Les malheureux échangèrent un coup d’œil et restèrent muets. Ils clignaient des yeux comme éblouis et haletaient.

— Eh bien ! quoi donc ? reprit Arkadi Pavlitch, et se tournant vers Sofron : — De quelle famille sont-ils ?

— De la famille Toboleiev, répondit lentement le bourmistre.

— Eh bien, que voulez-vous ? dit de nouveau Arkadi Pavlitch. N’avez-vous pas de langue ? Parle, toi, vieux. Qu’est-ce qu’il te faut ? N’aie pas peur, imbécile !

Le vieillard tendit son cou de bronze, tout ridé, ouvrit gauchement ses grosses lèvres bleuies et dit d’une voix chevrotante :

— Défends-nous, seigneur !…

Et, de nouveau, il tomba le front à terre ; le jeune homme l’imita. Arkadi Pavlitch les regarda gravement, puis changeant d’attitude :

— Quoi ? dit-il, de quoi te plains-tu ?

— Grâce, seigneur ! laisse-nous respirer. Nous sommes torturés, martyrisés…

Le vieillard parlait avec peine.

— Et qui donc te martyrise ?

— Mais… le bourmistre, batiouchka.