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Page:Tourgueneff - Récits d un chasseur, Traduction Halperine-Kaminsky, Ollendorf, 1893.djvu/258

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Arkadi Pavlitch resta un moment silencieux.

— Comment t’appelle-t-on ? reprit-il.

— Anthippe, batiouchka.

— Et ce garçon ?

— C’est mon fils, batiouchka.

Arkadi Pavlitch se tut de nouveau et tordit sa moustache.

— Eh bien ! Qu’est-ce que t’a fait Sofron ? prononça-t-il en regardant le vieillard à travers sa moustache.

— Batiouchka ! il nous a dépouillés, ruinés… il a donné par passe-droit deux de mes fils au recrutement et il veut m’enlever le troisième. Hier, il m’a pris ma dernière vache et, Sa Grâce (il désignait le starost) a battu ma baba !

— Hum ! fit Arkadi Pavlitch en fronçant les sourcils.

— Ne permets pas qu’il nous achève, père nourricier !…

— Qu’est-ce que cela veut dire, pourtant ? demanda le maître au bourmistre à demi-voix.

— Un ivrogne, répondit le bourmistre de même, un paresseux… Il ne parvient pas à sortir des arriérés.

— Oui, cria le vieillard, et même que Sofron Yakovlitch a payé pour moi, batiouchka, voilà cinq ans… et, sous prétexte qu’il paye pour moi,