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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/162

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— Non, non, de grâce, ne dites rien pour le moment à votre mère, s’écria Sanine avec une sorte d’effroi… Attendez… je vous dirai… je vous écrirai… et jusque-là ne prenez pas de décision… attendez ma lettre…

Il serra vivement la main de Gemma et se leva d’un bond. Au grand étonnement de Frau Lénore, il passa devant elle, leva son chapeau en murmurant des paroles incompréhensibles et disparut.

Madame Roselli s’approcha de sa fille.

— Je t’en prie, Gemma, explique-moi… ?

La jeune fille, pour toute réponse, se leva et embrassa sa mère.

— Chère maman, voulez-vous, s’il vous plaît, attendre ma réponse encore un peu de temps… pas longtemps, jusqu’à demain… Je vous en prie… Jusqu’à demain vous ne me direz plus rien ? Oh !…

Gemma fondit soudainement en larmes de joie, si spontanées, qu’elle-même ne les sentit pas venir.

Frau Lénore devint de plus en plus perplexe : Gemma pleurait et son visage n’était pas triste mais plutôt joyeux.