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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/176

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main inconnu qui devait lui apporter le bonheur, le bonheur idéal, suprême !

Il lui semblait qu’une gaze fine, légère, s’étendait sur son horizon intellectuel, et derrière cette gaze qui flotte mollement, il sent… il sent la présence d’un jeune visage divin, immobile, avec un sourire caressant sur ses lèvres, et les paupières baissées, pour simuler la sévérité… Et ce visage n’est pas le visage de Gemma, c’est le bonheur lui-même !…

Enfin son heure sonne ! Le rideau se lève, les lèvres s’entr’ouvrent, les paupières se lèvent, la divinité apparaît, et une lumière radieuse, et la joie, l’extase infinie…

Il pense à ce jour de demain et son âme se noie de nouveau dans l’angoisse de l’attente frémissante.

Mais cette attente et cette angoisse ne l’empêchent en rien… ne l’empêchent ni de dîner bien avec Emilio dans un troisième restaurant… Et ce n’est que par instants que jaillit en lui comme un éclair cette idée : « Si quelqu’un savait !! »

L’attente ne l’a pas empêché non plus de jouer avec Emilio au cheval fondu… en plein