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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/183

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lui ne regardait pas le visage de la jeune fille, mais ses mains jointes qui tenaient une petite ombrelle.

De quoi auraient-ils pu parler ? Que pouvaient-ils se dire qui fût aussi éloquent que le fait de leur présence en cet endroit, au rendez-vous, de si bon matin, et tout près l’un de l’autre ?

— Vous n’êtes pas fâchée contre moi ? murmura enfin Sanine.

Il eût été difficile de dire quelque chose de plus bête… Sanine le sentait lui-même… Mais au moins le silence était rompu…

— Moi ?… fâchée ? dit-elle… Pourquoi ?… Non…

— Et vous croyez ?… reprit-il.

— Ce que vous m’avez écrit ?

— Oui !

Gemma baissa la tête et ne répondit pas. L’ombrelle glissa de ses mains, mais fut ressaisie avant de tomber à terre.

— Oui, ayez confiance en moi, croyez à ce que je vous ai écrit ! dit Sanine.

Toute sa timidité s’évanouit et il parla avec feu.