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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/297

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tout ce qu’on joue admirable, splendide, bien qu’il regorge de fiel qu’il n’ose pas répandre… Il aime par-dessus tout papoter, et j’ai peur qu’il publie dans tout le théâtre que j’y suis… Après tout, cela m’est égal…

L’orchestre joua une valse et le rideau se leva de nouveau !…

Sur la scène les grimaces et les hurlements reprirent de plus belle.

— Eh bien ! dit Maria Nicolaevna en se laissant choir sur le divan : puisque vous êtes captif, et obligé de rester auprès de moi au lieu d’admirer votre fiancée, — non, non, n’écarquillez pas les yeux, ne vous fâchez pas — je vous comprends et je vous ai déjà promis de vous laisser aller où bon vous plaira… Maintenant écoutez ma confession… Voulez-vous savoir ce que j’aime le plus au monde ?

— La liberté ! dit Sanine.

Maria Nicolaevna posa sa main sur la main du jeune homme.

— Oui, Dmitri Pavlovitch — dit-elle très sérieusement, et sa voix vibra avec un accent de sincérité irrécusable… la liberté avant tout et par-dessus tout !… Et ne croyez pas que