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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/322

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— Moi, j’ai de vrais amis, mais ils ne sont pas vieux… ce cheval, par exemple, c’est aussi un ami… Comme il me porte délicatement ! Ah ! oui, l’on est très bien ici ! Est-il possible que je parte pour Paris après-demain ?

— Est-ce possible ? répéta Sanine.

— Et vous, vous partirez pour Francfort ?

— Oh ! moi, certainement, je retournerai à Francfort.

— Eh bien ! allez-y… Je vous donnerai ma bénédiction… Mais aujourd’hui, c’est notre jour, à nous, à nous… rien qu’à nous !

Les chevaux avaient atteint la lisière du bois et ils pénétrèrent dans la forêt. L’ombre fraîche les enveloppa doucement de toutes parts.

— Oh ! mais c’est le paradis ici ! cria Maria Nicolaevna… Allons au plus profond, plongeons-nous dans cette ombre, Sanine.

Les chevaux avançaient lentement dans les profondeurs de la forêt, se balançant et reniflant.

Le sentier qu’ils suivaient changea subitement de direction et s’engagea dans un défilé très étroit. L’odeur de la bruyère, des fougères, de la résine de pin, de la fane de l’année