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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/52

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deux ans en Angleterre, et en somme d’une élégance séduisante.

De prime abord il sautait aux yeux que ce beau jeune homme, un peu grave, mais très bien élevé et encore mieux lavé, était habitué à obéir aux ordres d’un supérieur et à commander à des inférieurs, et que derrière le comptoir de son magasin, il devait fatalement inspirer du respect aux clients.

Sa probité scrupuleuse ne pouvait pas être mise en doute ; il suffisait pour s’en convaincre d’un coup d’œil sur ses manchettes impeccablement empesées ! Sa voix d’ailleurs était en harmonie avec tout son être : une voix de basse assurée et moelleuse, mais pas trop élevée et même avec des inflexions caressantes dans le timbre. C’est bien la voix qui convient pour donner des ordres à des subordonnés : — « Montrez à Madame le velours de Lyon ponceau ». — « Donnez une chaise à Madame !… »

M. Kluber commença par se présenter à Sanine selon toutes les règles ; il inclina sa taille avec tant de noblesse, rapprocha si élégamment les jambes et serra les talons l’un