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Page:Tourgueniev - Eaux printanières, trad. Delines, 1894.djvu/76

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replié sur lui-même, la queue baissée, clignant timidement les yeux sous la visière du shako, posé de travers ; de temps en temps, quand Napoléon haussait la voix, Bernadotte se soulevait sur ses pattes de derrière.

Fuori, Traditore ! (va-t’en, traître) cria Napoléon, oubliant dans l’excitation de sa colère qu’il devait soutenir son caractère français. Alors Bernadotte se cacha sous le divan, puis revint aussitôt avec un aboiement joyeux, qui signifiait que la représentation était terminée.

Tous les spectateurs riaient aux larmes, et Sanine riait plus que tous les autres.

Gemma avait un rire fort agréable, continu et lent mais entrecoupé de petits cris plaintifs, très drôles… Sanine était en extase devant ce rire. Il aurait voulu pouvoir couvrir de baisers la jeune fille pour chacun de ces petits cris. Enfin la nuit tomba. Il était temps de se séparer.

Sanine prit plusieurs fois congé de tout le monde, et répéta à chacun à maintes reprises : — À demain ! Même il embrassa Emilio, et partit en emportant l’image triomphante de