Page:Trollope - La Pupille.djvu/223

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— Comptez sur moi, Richard. Mais je vous accorde qu’elle est bien odieuse, et que cette comédie est encore plus pénible avec elle qu’avec toute autre.

— Vous ne devriez pas parler ainsi, Marguerite ; cela me décourage encore plus, » reprit Richard en riant.

Et les jeunes Brandenberry se mirent en route bras dessus dessous en causant de leur importante affaire.

M. Jenkins resta encore plusieurs jours sans revenir à Thorpe-Combe, et miss Martin Thorpe commençait à craindre qu’il se fût pris d’affection pour une autre personne à laquelle il pourrait donner ses magnifiques joyaux. Mais quelles auraient été sa fureur et son anxiété, si elle avait su que chaque jour l’étrange visiteur passait plusieurs heures dans le pavillon de plaisance avec ces maudits Heathcote ! Si elle avait été plus gracieuse avec eux et qu’elle eût daigné leur parler, elle aurait probablement appris dans le courant de la conversation ces visites habituelles qui charmaient autant les Heathcote que M. Jenkins. Enfin, cet intéressant personnage parut un jour dans le boudoir. Sophie s’informa avec sollicitude de la raison qui l’avait tenu si longtemps éloigné de chez elle et l’avait empêché de venir visiter la maison, qu’elle avait fait préparer pour le recevoir.

M. Jenkins assura qu’il avait été souffrant, qu’il l’était même encore, et qu’il se voyait obligé de remettre son inspection à un autre jour. Le lendemain il revint encore, et ses manières furent, si cela est possible, plus étranges que les jours précédents. Il parla d’abord de choses fort indifférentes, puis s’écria tout à coup :

« De grâce, ma chère, quand pensez-vous que votre tuteur, sir Charles Temple, sera de retour en Angleterre ? Il y a déjà fort longtemps qu’il est parti.

— Ah ! monsieur, vous abordez là un sujet qui me cause bien des tourments, répondit Sophie avec une feinte mélancolie, et, si je n’avais pas eu le chagrin de