Page:Trollope - La Pupille.djvu/238

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comprendre, comme de coutume, il murmura avec indifférence, selon son habitude :

« Regardez cela, Elfreda. »

La jeune fille tendit la main, puis le bras, et parvint à saisir la lettre et à la lire. L’expression que prit sa figure parut si singulière que ses deux sœurs s’écrièrent en même temps :

« Qu’est-ce donc que cela, Elfreda ?

— C’est la lettre la plus étrange que j’aie jamais lue : c’est une invitation de Sophie Martin pour nous faire aller à Thorpe-Combe, voir un voyageur qui a connu le vieux Thorpe et désire connaître aussi les parents de son ami défunt.

— Laissez-moi voir, dit Eldruda.

— Vous me la donnerez quand vous l’aurez lue, » reprit à son tour Winifred.

Quand les trois sœurs eurent pris connaissance de la lettre, Eldruda s’écria :

« Comme elle écrit drôlement, cette Sophie !

— Cela me ferait plaisir d’y aller, » dit nonchalamment Winifred.

À ces mots les trois sœurs rapprochèrent leurs chaises et formèrent un conciliabule. Le vœu émis par l’une des trois nécessitait une discussion à la suite de laquelle on devait recueillir les avis et communiquer à M. Wilkins la résolution prise en commun.

« Il est vraiment ridicule d’aller une seconde fois à Thorpe-Combe chercher ce que nous ne pourrons jamais y trouver, opina l’aînée.

— Oui : mais il est si triste de rester toujours à la maison, soupira la jolie Winifred, que, quoique nous tenions fort peu à connaître ce gentleman… célibataire, je crois, il serait absurde de perdre, en refusant l’invitation, la seule occasion que nous trouverons, de longtemps peut-être, de nous distraire un peu.