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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/793

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des lois publiées en 1763 et 1764 sur la liberté du commerce des grains ne sont pas aussi connues qu’elles devraient l’être, non-seulement du peuple, mais même de quelques-unes des personnes chargées d’en maintenir l’exécution.

J’ai cru devoir, en conséquence, faire distribuer de nouveau dans la province un assez grand nombre d’exemplaires de la déclaration du 25 mai 1763 et de l’édit de juillet 1764, afin d’en répandre la connaissance.

J’y ai joint un ouvrage composé par M. Letrosne, avocat du roi au bailliage d’Orléans, qui démontre avec autant de clarté que de force, et qui doit rendre sensible à tous les esprits, la sagesse et l’utilité de ces lois dans tous les temps et dans toutes les circonstances. S’il pouvait vous rester quelques doutes sur cette matière importante, je suis persuadé que la lecture de cet excellent ouvrage achèverait de les dissiper, et que, si l’amour du devoir et votre attachement aux lois établies par l’autorité du roi suffisent pour exciter votre vigilance à les faire observer, il s’y joindra encore dans cette occasion ce zèle qui naît de la conviction intime de leur nécessité et de l’avantage qu’en recueille le public. Je ne doute pas que, pénétré comme l’auteur de la solidité des vues bienfaisantes qui ont engagé à consacrer par une loi solennelle la liberté du commerce des grains, vous ne vous fassiez un devoir et un plaisir de travailler à répandre la même conviction dans tous les esprits. Les moyens d’y parvenir sont de répondre avec douceur et en détail aux plaintes populaires que vous entendez chaque jour ; de faire parler le langage de la raison plus que celui de l’autorité ; d’engager les curés, les gentilshommes, toutes les personnes qui, par leur état et leurs lumières, sont à portée d’influer sur la façon de penser du peuple, à lire l’ouvrage de M. Letrosne, dont je vous adresse dans cette vue plusieurs exemplaires, afin que, persuadés eux-mêmes, ils puissent travailler de concert avec vous à persuader les autres.

Sans entrer dans les principes que M. Letrosne développe avec tant de netteté, il suffit de consulter le plus simple bon sens pour voir que toutes les récoltes ne sont pas égales ; que, les grains étant dans les mêmes lieux quelquefois très-abondants, et d’autres fois très-rares, et dans les mêmes années manquant souvent dans un canton, tandis que dans d’autres on en a beaucoup plus qu’on n’en peut consommer, l’on ne peut vivre, dans les années et dans les can-