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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/131

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mise au chapeau au profit de celui qui tombera. Il faut même avouer <|iic, pour ce dernier article, il paraîtrait bien dur d’arrêter le mouvement naturel qui porte chacun des garçons assemblés pour tirer à consacrer, de concert, une petite somme pour celui d’entre eux sur qui tombera le sort, dont tous sont également passibles. On n’imagine même pas trop quelle raison a pu déterminer le législateur à défendre une chose qui semble si conforme à la justice et à l’intérêt commun de tous ceux qui contribuent à former cette petite masse. Aussi, malgré cette disposition de l’ordonnance, l’usage de mettre au chapeau s’est-il toujours maintenu, et les personnes chargées de suivre les détails de l’opération des milices n’ont jamais eu le courage de s’y opposer.

La mise au chapeau conduit aisément à l’admission des miliciens volontaires ; car si parmi les garçons appelés au tirage il s’en trouve un qui, se sentant moins de répugnance que les autres pour le service, offre de se charger du billet noir pour le seul appât de la somme fournie par les autres au chapeau, comment se refuser à cette offre, et forcer vingt autres, qui n’ont pas les mêmes dispositions et seront moins bons militaires, à s’exposer à un sort qui les afflige et dérange leurs relations de famille, leurs attachements les plus chers, lorsqu’un autre veut bien le subir de son plein gré, et se trouvera heureux de ce qui fait leur malheur ? Aussi, quoique la tolérance sur cette admission de miliciens volontaires ait été moins générale que celle de la mise au chapeau, elle est cependant encore très-commune. La substitution d’un homme à la place du milicien du sort est encore très-favorable, et d’autant plus que le milicien en faveur duquel s’opère la substitution répond du service au défaut du substitué, ce qui fait, pour assurer le service, deux hommes au lieu d’un. L’ordonnance autorise cette substitution dans le cas où un frère se présente pour remplacer son frère, et encore lorsque le milicien du sort est un homme marié et ayant des enfants. Mais, quoiqu’un homme ne soit pas marié, mille raisons que l’ordonnance n’a point prévues peuvent le rendre nécessaire à sa famille, et il y aurait de la dureté à le contraindre de servir lorsqu’il offre de mettre à sa place un homme qu’on est toujours le maître de refuser, s’il paraît moins propre au service que celui qu’il remplace. Malgré la rigueur qu’annoncent les dispositions de l’ordonnance dans cet article 16, elle suggère elle-même, au paragraphe 65 de l’ar-