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Extrait de l’arrêt du Conseil d’État, du 7 avril 1775, qui casse deux ordonnances des officiers de la sénéchaussée et lieutenants-généraux de police de La Rochelle, des 9 et 10 mars 1775.

Ces officiers avaient ordonné la visite dans les greniers de grains venant de l’étranger, et en avaient suspendu la vente pour une autre visite être faite après quinze jours.

Sa Majesté a reconnu que ces officiers ont excédé le pouvoir qui leur est confié, qu’ils ont même contrevenu aux lois données par Sa Majesté pour accorder au commerce des grains la liberté qui lui est nécessaire.

Que le pouvoir attribué à des juges de police ne s’étend pas jusqu’à faire visiter les grains que l’on garde en magasins ; qu’en aucune occasion, que sous aucun prétexte, ils ne peuvent se permettre d’ordonner de telles visites, parce que des grains gardés dans des magasins ne peuvent jamais nuire au public.

Que c’est au commerçant dont les grains ont souffert dans le trajet quelque dommage, à déterminer s’il doit, ou s’il veut faire les dépenses nécessaires pour le réparer, et la manière et le temps qu’il emploiera pour y parvenir, sans qu’aucun juge de police puisse ni faire visiter ces grains, ni lui fixer un délai pour les remettre dans un meilleur état, ni constater par une procédure qu’il ne les y a pas rétablis ; que l’intérêt du commerce est à cet égard la seule règle qu’il doive suivre ; qu’il peut user de sa chose comme il lui plaît, et qu’aucun juge ne peut violer ce droit de la propriété.

Que la vente même de ces grains ne peut pas être interdite ; qu’elle est souvent nécessaire ; qu’elle ne peut être nuisible.

Que cette vente est souvent nécessaire ; que l’usage, autorisé par l’ordonnance de la marine, est dans le commerce de faire assurer les marchandises que l’on transporte par mer, et même sur les rivières navigables, moyennant une prime d’assurance proportionnée à la valeur de la cargaison, et donnée à des compagnies ou à des particuliers qui, sous le nom d’assureurs, prennent le péril sur eux ; qu’en conséquence les avaries sont à la charge des assureurs, pourvu qu’elles ne proviennent point du vice propre de la chose, et qu’elles arrivent par quelque accident de mer ; mais que, pour que les assurés puissent en exiger le remboursement, il est nécessaire qu’ils prouvent non-seulement qu’il y a une avarie, mais quelle en est l’évaluation ; que, suivant la pratique usitée dans les amirautés du