Aller au contenu

Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

25 avril 1774 a permis le transport des grains dans le port de Cannes en Provence, et celui du 22 juin suivant dans les ports de Saint-Jean-de-Luz et Sibourre, il reste encore plusieurs ports, où il n’y a point de siège d’amirauté, par lesquels le commerce des grains par mer reste interdit ; s’il est permis de transporter des grains au port de Saint-Jean-de-Luz, il est défendu d’en sortir par ce port pour tous les autres ports du royaume ; pour les ports de la même province, la quantité de grains qu’il est permis de charger est limitée à cinquante tonneaux. Les formalités rigoureuses auxquelles le transport est assujetti peuvent détourner les sujets de notre royaume de se livrer à ce commerce, et faire rester, au préjudice des propriétaires, les grains dans les provinces où ils seraient surabondants, pendant que d’autres provinces, qui auraient des besoins, en seraient privées : l’arrêt du 14 février 1773 rend les capitaines responsables des effets des mauvais temps, et les condamne aux amendes et aux confiscations ordonnées, même lorsque les gros temps les auront obligés de jeter leur chargement ou une partie à la mer, et les oblige de faire verser dans le port pour lequel la cargaison était destinée, la même quantité de grains venant de l’étranger, qui est mentionnée en l’acquit-à-caution.

Enfin, les amendes qui sont portées à trois mille livres, indépendamment de la confiscation, sont prononcées dans le cas où, au lieu de la sortie, il y aurait un excédant de plus d’un dixième des grains déclarés ; et, au lieu de la rentrée, un déficit de plus du vingtième : mais dans une longue traversée des ports du royaume les plus éloignés, il pourrait souvent y avoir des déchets plus considérables sur les grains qui seraient transportés d’une province à une autre. Tant d’entraves, la crainte d’encourir des peines aussi sévères que celles de la confiscation de toute la cargaison et des bâtiments, étaient faites pour empêcher les négociants de se livrer à un commerce qui pouvait compromettre aussi considérablement leur fortune, et ne pouvait produire d’autre effet que de laisser subsister, entre les différentes provinces, une disproportion dans les prix des grains que la liberté du commerce la plus entière peut seule faire cesser.

Ces principes, qui ont déterminé Sa Majesté à rendre à la déclaration de 1763 toute l’exécution que des lois postérieures avaient affaiblie, lui ont fait penser qu’il fallait également rendre au commerce par mer toute la liberté nécessaire pour maintenir l’équilibre